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Introduction
Chapitre 1
  L'acoustique de la clarinette
Chapitre 2
  Le mécanisme de production
du multiphonique.
Chapitre 3
  Les détimbrés, les micro-intervalles et les 1/4 de tons.
Chapitre 4
  Les multiphoniques.
Annexe
Bibliographie
Tableau 1
Tableau 2
Tableau 3
Tableau 4

Etude générative des multiphoniques, des 1/4 de tons,

des micro-intervalles.

 

par Alain SEVE

 

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Nous remercions ici tous ceux qui, par leurs apports et échanges nous ont aidés dans notre travail et particulièrement :

 Alain Bardonnesci
Eric Humbertclaude
Henri Jibaud
Jean-Mathias Pétri
Damien Charron
Dominique Lemaitre

  Ainsi que tous ceux qui, par leurs conseils judicieux et leur relecture attentive nous ont permis d’améliorer son édition . 


 SCHÉMAS UTILISÉS POUR LA NOMENCLATURE DES DOIGTÉS

 Pour éviter toute confusion, les sons réels seront seuls munis d'un indice, ex. : ( Mi 3), le reste de la notation étant pensé dans la tonalité de la clarinette concernée sans tenir compte des transpositions. La facture instrumentale divise la famille des clarinettes en 2 groupes distincts : les instruments à anneaux d'un coté (Mib, Ut, La, Sib) et les instruments à plateaux de l'autre (clarinette alto, cor de basset, clarinette basse, clarinette contrebasse).

 

Le clétage du cor de basset et de la clarinette contrebasse diffèrent quelque peu en ce qui concerne le clétage des extrèmes graves, il en va de même pour la clarinette basse en fonction des modèles et des fabriquants

 

Schéma général :

Héraclite (fr. 51 Diels)

"L'unité, en s'opposant à elle-même, se compose, de même que l'harmonie de l'arc et de la lyre"


INTRODUCTION  

A l'écoute du matériau sonore proposé par les compositeurs de la seconde moitié du  vi ngtième siècle, il faut bien admettre que la société dans son ensemble (auditeurs, interprètes, compositeurs, facteurs d'instruments, chercheurs, acousticiens, scientifiques, etc...) doit revoir ses jugements tant esthétiques que techniques pour accéder à "l'inouï " qui  lui est maintenant proposé. Quoi de plus étonnant que de parler d'accord pour un  instrument comme la clarinette réputée monophonique ? Au début de la seconde moitié du vingtième siècle, le monde musical a découvert (redécouvert) qu'il était possible d'exécuter, sur les instruments à vent de la famille des bois, des sons multiples de différentes couleurs et densités. Ne pouvant prendre modèle sur les instruments polyphoniques, ce  nouveau mode de jeu, du fait de ses règles propres, s'est révélé d'un maniement complexe aussi bien pour le compositeur que pour l'interprète ou l'acousticien.


§1 LE PARADOXE

L'énoncé le plus simple du paradoxe est :

Il est possible d'émettre simultanément plusieurs sons à partir d'un instrument à vent réputé monophonique.

 Cette glose a l'avantage de renvoyer directement à la notion d'accord (multi/poly-phonie) et d'être suffisamment imprécise pour concerner tous les cas de figures. Ainsi le fait de chanter dans un instrument à vent, simultanément à l'émission traditionnelle du son produit aussi un effet multiphonique.

Cependant ce mode de jeu, bien que délicat, ne pose, a priori, aucun problème de  compréhension, les deux sources sonores étant distinctes: d'un côté les cordes vocales, de  l'autre le système excitateur de l'instrument. (A l'annexe de cet ouvrage nous traiterons des limites propres à la physiologie dans l'exécution de ce mode jeu.)

Mais en dehors de ce cas spécifique, il reste le paradoxe des multiphoniques ayant pour origine un seul système excitateur comme peuvent en produire les instruments de la  famille des bois.

Ainsi sur un saxophone alto, un doigté de tel type produit un multiphonique de trois sons (Cf. D. KIENTZY - "Les sons multiples aux saxophones" - p.39 n°58 - Ed. Salabert).

Exemple n°1 :

(en ajoutant les clés de Do (7) et Si (B) grave)

De même sur une flûte à bec soprano un doigté du même type permet un double son.

Exemple n°2 :

Il en va de même pour une flûte traversière, un hautbois, un basson, etc...

(Cf. B. BARTOLOZZI-News Sounds for Woodwinds-Ed. Oxford Univ. Press-1974 ).

La comparaison des doigtés permet de constater que la technique des multiphoniques possède au niveau de la colonne d'air, des principes communs aux instruments de la famille des bois qui présentent tous la caractéristique d'une perce dont la longueur utilisée se règle par une suite d'ouvertures actionnées aux moyens des doigts et des tampons.

En conséquence la méthodologie utilisée pour analyser la clarinette, instrument à  anche battante simple, pourra en partie être réutilisée pour l'ensemble de la famille des bois. Mais il faudra prendre en considération les caractères spécifiques de chaque famille d'instruments (perce conique/cylindrique, système excitateur: anche simple/double..., clétage, etc...) pour aller plus avant dans leur méthodologie propre.


§2 PROLÉGOMÈNES À UNE MÉTHODOLOGIE DES MULTIPHONIQUES

Nous traiterons tout d'abord des possibilités de jeu à la clarinette Si bémol que nous comparerons ultérieurement aux autres types de clarinette (Mi bémol, Basse, Contrebasse, etc...).

Sur une clarinette Si bémol, ce doigté :

Exemple n°3 :

permet d'obtenir un accord où deux sons simultanés dominent. De la perception de cet objet sonore on peut déduire deux types d'anomalies :

 

a) Les anomalies de jeu

- Emission simultanée de plusieurs sons sur une même colonne d'air mue par un seul système excitateur : l'appareil anche + bec.

 

- Indépendance relative des composantes entre elles. Il est possible d'émettre chaque son séparément ou de les enchaîner simultanément.

Exemple n°4 :

 

Il est possible de triller un des composants :

 

Exemple n°5 :

 

b) Les anomalies acoustiques

 - Difficultés de justifier, conformément à la théorie des harmoniques, la relation des éléments du multiphonique entre eux : une 7ème Majeur dans le cas de l'exemple n°3 ou une octave inattendue chez un instrument réputé pour ses harmoniques impaires dans le cas de ce doigté.

 

Exemple n°6 :

(Il est entendu que ces exemples ont été choisis dans la catégorie des multiphoniques de  faible densité pour plus de clarté ).

- Localisation surprenante de l'émission de chaque son :

Le son grave est émis en partie supérieure (ex. n°3 => clé 9 ; ex. n°6 => clé 11).

Le son aigu est émis en partie inférieure (ex. n°3 => clé 6 ; ex. n°6 => 1er cheminée du corps du bas).

L'ensemble de ces anomalies révèle un comportement de l'instrument qui peut paraître contre nature. Mais l'origine du paradoxe (tant perceptif que technique) des possibilités multiphoniques de la clarinette est dans la nature même du système de l'instrument que l'on ne peut réduire totalement au modèle de la corde vibrante ; ce qui a rendu jusqu'ici son analyse très délicate.


 §3 LES ANOMALIES DE PRODUCTION SONORE

 Nous appellerons anomalies de production sonore les modes de jeu faisant intervenir une technique différente de l'utilisation classique de l'instrument.

Les anomalies peuvent être réparties en 3 catégories :

- 1) les détimbrés

- 2) les micro intervalles (+,-, ¼ ton)

- 3) les multiphoniques

 Il faut noter que des effets comme le flatterzunge ou le chant dans l'instrument ne sont pas à considérer comme des anomalies de production sonore par le fait qu'ils peuvent s'ajouter à ces dernières et qu'ils surchargent la production sonore sans être elle-même.


 §4 LES SONS DÉTIMBRÉS

 Le son détimbré s'obtient par un doigté spécifique qui nécessite, tout comme le multiphonique, un équilibrage particulier de la colonne d'air. Ces doigtés spécifiques présentent des structures complexes d'application, et les registres de la clarinette n'y réagissent pas avec un égal bonheur. De plus le clétage limite et conditionne les possibilités d'utilisation.

Le chalumeau et le médium

A part les dernières notes (du fait du clétage), les doigtés spécifiques existent pour l'ensemble du registre. Le médium étant quasiment détimbré par nature, il faut plutôt considérer que l'on utilise des doigtés spécifiques de timbre par souci d'homogénéité.

Le clairon

L'utilisation de la clé de douzième rend difficile l'usage de doigtés à structure complexe.

La moindre variation de pression de la poussée physiasmique (Cf. Chapitre III, §1,"Technique de production du multiphonique", p.24) entraîne le passage aux harmoniques supérieures. En outre, les doigtés utilisés pour le chalumeau et le médium n'ont pas de correspondance dans le clairon.

Le suraigu

Il possède déjà à l'état naturel tout un lot de doigtés de structure complexe, nécessité par la recherche de la justesse, et il existe, dans le nombre, des doigtés qui permettent une émission de faible intensité; mais il ne s'agit plus à proprement parler de détimbrés.


 §5 LES MICRO-INTERVALLES

Les micro-intervalles nécessitent aussi l'utilisation de doigtés à structure complexe comparables à ceux des détimbrés. Les limites d'utilisation sont cette fois, uniquement du  domaine du clétage. Dans les zones inopérantes (cf. extrémités de l'instrument), le musicien peut utiliser des subterfuges (Variation de la pince sur l'embouchure, utilisation des genoux pour boucher à moitié les quatre derniers trous, etc...,) ( Cf. Phillip REHFELDT­  New Directions for Clarinet - University of California Pres - 1976 ) qui ne garantissent ni  la  précision, ni la justesse, ni surtout la virtuosité.

Tous les registres sont opérationnels et la correspondance traditionnelle entre le  chalumeau, le médium et le clairon est en grande partie observée.


§6 LES MULTIPHONIQUES

Nous verrons que, dans le chapitre qui leurs est consacré, toute une catégorie de  multiphoniques dépendent directement de la combinatoire des techniques des détimbrés et des micro-intervalles.

Ainsi les anomalies de production sonore présentent des caractères communs dans l'utilisations de doigtés à structure complexe, qui sont révélateurs du comportement acoustique de l'instrument et dont la compréhension et la maîtrise apporteront une plus grande facilité de maniement tant pour le musicien que pour le compositeur.

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